L'expérience littéraire de René Daumal, Hermann Hesse, Carlos Castaneda : du malaise occidental à la sérénité indienne

Trois témoins de la crise du monde moderne

De nombreux intellectuels du XXe siècle ont estimé que l’Occident traversait une crise sans précédent, signe de sa décadence. Daumal, Hesse et Castaneda ont été des leurs. Ils ont participé à la critique d'une modernité réduisant souvent l'homme à ses relations au système de surproduction et à l'univers technologique dont il dépend. Ils ont remis en cause des mécanismes d'appauvrissement mental écartant l'homme de sa nature essentielle et le coupant de la Nature.

Écrire, se construire : les modèles indiens

Leurs œuvres témoignent aussi de la nécessité de recourir à des modèles exogènes aptes à compenser cette situation. D'où leur intérêt pour une sagesse indienne incarnée, pratique et susceptible de nous aider à mener une vie plus accomplie. Ici, l'Inde ne se limite pas à un territoire géographique. Le mot désigne une pensée immémoriale mais aussi un espace symbolique qui transparaît dans l'unité des voies de connaissance et de réalisation spirituelle. Dès lors, l'expérience littéraire témoigne d'un accès possible à la connaissance libératrice. Dans ce contexte, la construction de soi devient la modalité essentielle du projet d'écriture.

PREMIÈRE PARTIE
Les États-Unis (1955-1991) : archétype d'un malaise occidental
1. USA (1955-1991) ou le besoin de transcendance

2. Les apports spécifiques de Hesse et de Castaneda

3. Les États-Unis : une image synthétisante de la crise

DEUXIÈME PARTIE

Hesse, Castaneda, Daumal et la crise du monde moderne

1. La critique de la modernité dans les œuvres de Castaneda, Hesse et Daumal

2. Valorisation de la nature

TROISIÈME PARTIE
Approches de la sérénité. Étude des spécificités

1. Hesse, Daumal et l'Inde
2. Étude des spécificités de la voie de la connaissance donjuanesque

1. Apprentissage

2. "Carré" et "Cercle"

3. Propédeutique

Daumal, Hesse, Castaneda ou le refus de croire sous le poids du savoir moderne que le "je est je", que le monde est clos, qu'il faille se tenir debout seulement dans notre propre savoir, au sein de notre propre culture, renonçant à l'expérience du divers, à la tentative du métissage, à la certitude qu'une richesse est ailleurs, au sein d'un monde où la séparation n'est qu'apparence, ou "l'étoffe de l'univers et de l'étoffe de l'esprit", ou l'expérience du tragique en tant que catégorie essentielle de l'existence est inconcevable.

Le "carré" et le "cercle" brisé

Nous avons imposé le "carré" au "cercle", en voulant réduire à notre idée de la stabilité, à notre idée du temps, un monde organisé à partir du symbolisme du cercle, un monde ouvert au temps cosmique, un monde qui sacralise l’union de l’homme avec la nature et la divinité. L’Eldorado est mort avec la destruction du "monde enfant", avec l’avènement du "paradis perdu" et l’uniformisation grandissante. Le cercle s’est brisé au moment même où l’on reconnaissait notre adhésion au monde fini, où l'on contraignait des peuples à accepter, à surmonter le siècle et non plus à le refuser. (…) En brisant le "cercle magique" des Indiens, on ne se rendait pas compte vers quel péril nous entraînions notre propre esprit, dans quel isolement nous allions placer l’homme archaïque vivant au cœur de notre être.

CHAPITRE 1
U.S.A. (1955–1991) ou le besoin de transcendance

1. La contestation : à la rencontre de Hesse et de Castaneda

2. L'importance des grands mouvements de revendication

3. L'usage des psychédéliques

4. L'apport oriental aux U.S.A.

CHAPITRE 2
Les apports spécifiques de Hesse et Castaneda

1. La marginalité

2. Réflexions sur le rôle de six œuvres majeures de Hesse

3. La dérision

CHAPITRE 3
Les États-Unis : une image synthétisante de la crise

1. Les États-Unis à l'avant-garde des signes pathologiques

2. Les jugements de René Guénon

3. Constat général sur l'Occident

Dénoncer l'hégémonie du "carré" et retrouver le "cercle"

Dénoncer l’hégémonie du "carré", c’est dénoncer l’emprise sur l’homme individuel d’une situation historique où triomphe un matérialisme sécrétant une aliénation grandissante ; c’est admettre indéniablement qu’une réflexion sur les valeurs sous-jacentes à la civilisation moderne occidentale est nécessaire si l’on veut saisir l’homme en marge de son historicité, le comprendre tel qu’il est et non pas tel qu’il est devenu.

CHAPITRE 2
Valorisation de la nature

1. N'oublions pas Joseph Beuys

2. Hesse et la nature

3. Castaneda et le respect de la terre

4. La nature dans Le Mont Analogue : apparences et symboles

5. Conclusion

Éloge du "cercle"

CHAPITRE 2
Étude des spécificités de la voie de la connaissance don juanesque

1. Intérêts littéraires et anthropologiques

2. Structure de la voie

1. Dissolution du "carré" dans la réalité du "cercle"

2. L'Inde comme altérité. La problématique des représentations

3. Yoga poétique et guerrier spirituel

4. Vision de "l'Est"

Si le monde moderne occidental, générant son propre malaise, semble vouer à vivre irrémédiablement la dimension tragique d'une existence extravertie, il est aussi baigné par l'espoir d'un renouveau que Chögyam Trungpa perçoit dans ce qu'il nomme « l'influence constante du soleil du Grand Est ». Cette influence n'est autre que l'éclat et le rayonnement immuable de la Connaissance. (…) Le chemin du "Grand Est", c'est la possibilité d'assumer pleinement le monde tel qu'il est et l'art de demeurer centrer au sein du silence intérieur.

Réaction de Hermann Hesse

Justification des recours à des modèles orientaux